C’était au Centre Leclerc de Marmande. Il y avait une teutonne dont l’avantageuse physionomie mammaire me faisait penser à Marilyn Monroe, mais en plus jeune qu’au moment du suicide de cette ex-compagne d’Elia Kazan, donc entre vingt et quarante ans.

L’allemande portait un mange-fesses pigeonnant à franges très courtes qui lui faisait rebondir les escoutilles de derrière. La miss se trouvait, comme moi, au rayon fruits et légumes, pas loin de la gondole de promotion des saucissons de canard du Lot-et-Garonne.

Ça sentait l’artichaut, les lardons frits, le parfum à la vanille, la crème solaire et le liquide à récurer le sol.

La sculpturale donzelle tâtait quelques fruits de saison, notamment des cantaloups énormes. J’observais ses doigts qui déambulaient sur les aumônières juteuses des fruits dont les petits pédoncules semblaient se hérisser subrepticement. J’avoue que ses palpations étaient si sensuelles que cela me donna envie d’en connaître un peu plus sur son art de la pesée.

J’allais parler roberval et fléau à grains quand un type âgé, vêtu comme un ministre, s’interpose entre elle et moi, et lui raconte, je ne sais trop quoi… Peut-être, un truc sur la hausse des prix, la rotondité du fruit de Cavaillon ou l’irrésistible attirance des hommes âgés pour les écornifleuses…

Il avait le regard vicieux des énarques vieillissants.

Tout à coup, notre bimbo se précipite sur des quetsches… La frisée saisit une poignée et les fourre dans son cabas. Le vioque est désorienté.

À coup sûr, j’imagine que ce subterfuge était une escapade habile de notre poupée germanophone face au lourdaud à dentier.

Observant le gâteux, et à y regarder de plus près, je me demande si nous n’avions pas affaire au fameux sérial cucurbitacéleur tripoteur dont le portrait a été tracé dans Sud-Ouest d’hier matin. J’en mettrais ma main à couper…

Au moment où cette évidence me saute aux yeux, le sénile se désintéressant de la fille charnue, commence à zieuter une autre victime solitaire.

Une poignée de minutes passent, un temps court comme la lecture d’un journal gratuit…

Essayant de retrouver Marilyn, je constate alors qu’elle papouille en plein centre d’un linéaire de boîtes de confits d’oie, avec un jouvenceau de son âge et je l’entends se plaindre de harcèlement.

Au maximum de la colère, elle détale, éructant des propos venimeux.

Il y a aiguille sous roche. Le gars n’agit pas seul mais en duo ! Il faut que j’avertisse la presse, la gendarmerie et mon oncle d’Amérique.

Texte publié le 3 Août 2006 - Coïtus Impromptus version 2 (Hommage à Raymond Queneau)