Ce jour-là était radieux. Un soleil exceptionnel illuminait le ciel de Provence, le bleu était permanent et le vent s'était calmé.

J'attendais fiévreusement le départ du cortège… Ma douce était magnifique dans une robe en dentelle… Les amis, la famille, les fleurs, l'auberge en pays d'Aix, les alliances… Les rires… La bonne humeur…

Je tapotais avec mes doigts la cheminée… Nous allions être en retard ! Je vous dis que nous allons être en retard ! C'est pas possible ça ! Vous avez vu l'heure ? Qui a les alliances ? La voiture est-elle prête ? Comment ça, je suis anxieux ? Vous ne connaissez pas les embouteillages à Marseille !

Me voilà costumé tout en velours, un œillet rouge à la boutonnière et le sourire un peu coincé du stressé de service.

Les autres s'amusent, suspendus dans une irréalité temporelle… La belle-mère arrange une fois de plus la robe de la mariée, lustre je ne sais quoi sur la table, ajuste la coiffure, une mèche ici, un pli qui dépasse là… Les autres, patauds, semblent prendre tout leur temps. Et en plus, on filme la scène ! Mon beau-père plaisante… Ma soeur et ma mère observent. Et le temps passe… Égrainant un cortège de secondes pesantes, de minutes fastidieuses… Tic, tac, tic, tac… Je regarde sans cesse ma montre, la pendulette sur la cheminée puis à nouveau ma montre…

Aujourd'hui, à la date anniversaire, ces souvenirs me reviennent à l'esprit… Et j'en souris.

La cérémonie se déroula calmement, la fête fut magique, la nuit de noce somptueuse… Et nous partîmes pour Paris en Lune de Miel, nous vîmes la Place des Vosges, Versailles, le Parc Montsouris, un poster de plage antillaise dans une chambre d'étudiante grecque, le Musée du Louvre, celui d'Orsay et tant de belles choses que l'on parfume qu'avec des yeux de 25 ans.

(C'est étonnant mais nous les voyons toujours, pourtant les ridules sont venues ternir l'éclat des visages, mais dans nos têtes rien n'a vraiment changé… C'est même bien mieux puisque des souvenirs se sont ancrés à nos sourires de complicité, nous nous connaissons bien et nous formons une âme complice)

Nos enfants ont grandi, nous respirons ensemble l'air du temps… Nous nous aimons.

Et cela dure depuis très longtemps.