Comme je regardai les vagues sous le vent
La pluie fit un écrin aux brûlures du temps
Des vapeurs d’océan montèrent jusqu’aux cieux
Comme je regardai les vagues sous le vent
J’imaginais aussi les palanques d’orient
Qui filaient voiles franches vers l’horizon fléchi
Embrasées de couleurs et de cris d’entropie
Aux accents autochtones et aux bistres d’antan
Comme je regardai les vagues sous le vent
Tu vins à mes côtés comme tu le fais souvent
Nous fîment le silence en nos âmes émues
Nous mîmes nos deux mains en jonques naufragées
La nuée se fit pâle, émouvante, innée
Et nous nous transformâmes en rochers de calcite[1]
Calendrier, réveil, graines de sable haineux
Tout passe dans le temps, tout passe, besogneux,
Les moments et les jours, les instants délirants.
Ne retiens pas ta joie, ne retiens pas le temps.
Car la vie avance, bien immuablement,
En dépit de tes voeux, d’un génie impéteux,
Elle affirme, têtue, tes défauts malchanceux
Qui te feront sombrer, pleurant abjectement.
Ne retiens pas ta joie, ne retiens pas le temps.
Et sans trêve, sans glaive, elle mène son combat
Fort impitoyable, contre toi, son passe-temps
Et elle te vaincra, sans pleurer notr’ tourment
Alors, tu céderas devant un tel constat :
Ne retiens pas ta joie, ne retiens pas le temps.[2]
Partis tous deux ensemble en nous tenant la main
Prêts à conquérir la vie par ce beau matin
Cette course devait être notre belle consécration
Cruel ce destin du nom de séparation
Sous le soleil de midi brûlait notre amour
Je redoutais l’arrivée du funeste jour
De ces premiers nuages noirs de l’après midi
Ô tristes ces souvenirs qu’encor je maudis
Cruel ce destin du nom de séparation
Si brutale que je crus à la machination
Sans aucune explication sur le bord de route
Je me retrouvai désemparé, dans le doute
C’était hier, pourtant c’était il y a longtemps
Mon pauvre cœur était jeune, il avait vingt ans[3]