Il était une fois…

Une jeune fille
Venue d'on ne sait où

Aux doigts si fins
Qu’en caressant le sable
Elle dessinait les dunes
En arabesques étranges…

Telles les volutes des cheveux d’ange.

On racontait qu’elle possédait
À la place des mains
Dix petites baguettes de fée
Aussi naturelles que magiques.

Elle était arrivée là
On ne sait trop comment.
Peut-être, un poète l'avait-il imaginée
Peut-être, une artiste l'avait-elle dessinée…

Où habitait-elle ?

Nul ne le savait.

Dans le cœur ?
Dans la tête des gens heureux ?
Dans l'ombre qui s'étire ?
Dans l'éclat d'un miroir ?

En tout cas

Elle était souvent là
Le soir sur la jetée
Se promenant paisiblement
En contemplant le ciel.

Elle était là
Quand personne n'y était…

Seule sa silhouette au loin.

On la devinait
Plutôt qu'on ne l'apercevait.
On imaginait ses lèvres qui bougeaient un peu.

Dans ces instants de quiétude,
Récitait-elle des odes lunaires,
Chantait-elle un hymne à la mer ?

On la devinait
Plutôt qu'on l'apercevait
Seule sa silhouette…
Et l'effluve de sa présence.

Un matin,
Un enfant pleurait si fort
Que les vagues se firent tempête.
Le vent devint bourrasque
La pluie redoubla d'énergie !

Elle arriva alors
Glissant sur le rivage

Le gamin
Et lui seul
Relevant les mèches sur son visage
La vit
Réellement

Elle le regardait avec douceur
Tant et si bien
Que le gamin vint se blottir dans ses bras.

C'était pour lui une sorte de renaissance…
Comme s'il avait reçu l'étreinte du Bon Dieu.

Pelotonné dans son empreinte,

De ses deux mains graciles
Elle caressa son petit visage
Et la brume des larmes
S’évapora en une sorte d’arc-en-ciel
Sur ses joues.

Le gamin raconta son histoire
À toute la Comté
Et devint forgeron
Parce que c'était un métier à étoiles qui filent.

C'est vrai
Qu'il frappait si fort sur son enclume
Que des étoiles jaillissaient
En sifflant des airs de danse.

La fée était-elle à ses côtés en ces instants vibrants ?

Les gens cherchèrent à rencontrer
La jeune fille
Pour la remercier
Et mieux comprendre qui elle était.

Ils voulaient aussi percer son secret.

Rien n’y fit.
Transparente elle restait
Inaccessible aux hommes

Alors avec le temps qui passait
Les cabanes qui se cimentaient
Et les moteurs qui hurlaient,
La jeune fille s’en alla,
S’évapora
Comme elle était venue.

Mystérieusement

On ne la vit plus.
Jamais plus…

Sauf,
Qu'à l’heure où j’écris ces quelques mots,
Il se chuchote à l’oreille

Que de jeunes amoureux
En regardant le ciel nocturne
Aperçoivent parfois
Lorsque le temps est clair
Une silhouette dorée
Au cœur de la Grande Ourse.

C'est elle
Qui virevolte
Réinventant pour eux
Des tracés aussi fins
Que ses dix doigts magiques.