Merci à toutes et à tous,

Je suis très touché par les mots que je reçois ici et ailleurs.

Tous ces messages d'amitié me font chaud au cœur. Vous me connaissais un peu par mes mots et ma façon d'être. C'est vrai, je suis quelqu'un de non identifié sur la Toile mais j'y ai beaucoup de blogami(e)s. Cela a de l'importance. Pour moi. L'amitié ne se s'apprécie pas par des poignées de mains mécaniques ou des bises qui claquent dans du vide en frappant sur des joues, comme d'utiles signes de reconnaissance.

Non, la blogosphère est avant tout un lieu d'amitié… au sens le plus noble, un endroit où nous n'avons rien à vendre, ce n'est pas une zone de quête. C'est un endroit de partage gratuit.

Oui, l'amitié ce n'est que du partage gratuit, ce n'est ni mercantile, ni une marchandise. Ce n'est pas forcément des corps qui se voient ou s'observent.

C'est pour cela aussi que je n'aime pas les réunions entre personnes qui bloguent. Ce sentiment dont je parle s'amoindrit à mes yeux.

Le départ d'une sœur si généreuse, et à l'âme si pure, est un immense drame pour moi et pour tous ceux qui la connaissaient. C'était une personne qui aimait. Elle pensait aux autres avant de penser à elle-même. Durant sa longue maladie elle fut un exemple de pugnacité, elle combattit le crabe avec détermination,, ne cédant pas d'un pouce, se stimulant jour et nuit, montrant un visage de combat, étonnant le corps médical, déjouant les funestes pronostics.

Elle était condamnée voilà plus de 5 ans. On ne lui donnait pas 6 mois à vivre. Elle fit la nique à ce diagnostic.

Quinze jours avant le drame, et devant accueillir "ses petits enfants"… au moment où elle ne pouvait qu'être allongée dans son lit… Elle sut encore trouver la force de caractère pour donner une image positive à ces jeunes… Elle se leva… Fit un peu de cuisine… Plaisanta… Alors qu'en dedans, la victoire de la mort était déjà accomplie. Plus rien ne fonctionnait… et ses muscles et ses os n'étaient qu'un souvenir d'humanité… Elle retrouva l'étincelle dans ses yeux. Cette étincelle qui fait que même dans les pires moments, les êtres humains retrouvent leur humanité.

Je ne voyais que ses yeux… Oubliant son corps décharné.

Elle ne voulait pas se retrouver seule à l'hopital, bardée de tuyauteries et gémissante… Elle était soignée en hopital de jour, c'est à dire, chez elle… dans son appartement, avec ses proches… Elle me disait avoir peur de mourir… Elle me disait qu'elle mettrait fin à ses jours si elle devenait un légume. Son corps n'était qu'une plaie… Qu'un amas de tâches de meurtissure… Mais parfois, quand seul à seule nous parlions, l'étincelle rejaillissait… Et j'étais si heureux d'avoir plaisanté ou dis une bétise pour la refaire briller à nouveau… un bref instant.

Je m'accrochais à cela. J'ai toujours vu renaître cette étincelle en de petits moments de vie…

En ce soir funeste, nous dûmes l'hospitaliser de toute urgence… sa respiration n'étant plus qu'un fil ténu… Elle souffrait comme jamais.

Elle s'accrocha, refusa d'y aller… Elle hurla… Demanda qu'on n'en fit rien.

Mais cela n'était plus possible.

Son époux put l'accompagner dans une chambre désolante de solitude… puis vers 22h00… Les hospitaliers demandèrent qu'il s'en aille… Dans un ultime combat, elle ne voulut pas rester seule… Elle accrocha sa main…

L'hopital en décida autrement.

2H30 après… Elle mourut d'un arrêt cardiaque… comme mon père… comme ce que j'ai failli moi-même vivre il y a peu. L'étincelle de son regard partit à jamais en 2 minutes. L'électro-cardiogramme était plat.

Quelques instants plus tard, j'étais en face d'elle… son visage était celui du sommeil apaisé. J'imagine encore cette étincelle sous ses paupières closes. Elle y est j'en suis sûr.

Je n'imagine que cela.

Je reste persuadé que son étincelle se trouve maintenant sur un chemin de lumière, aux côtés de celle de notre père de 49 ans, parti au moment où l'adolescence était à son zénith pour moi et où ma sœur était une jeune adulte…

Être bien entouré, je le suis assurément… mais je suis de ceux qui agissent et sur lequel reposent tant de choses, sur lequel on s'appuie, donc j'agis sans répit pour mettre en place tout ce qu'il est nécessaire de faire dans ces jours de deuil… Mes larmes coulent en silence… Mes proches m'entourent… Me soutiennent… Leur amour est très grand.

Ces temps sont difficiles… Mes pleurs coulent à flots continus dans ma tête. Ils épanchent ma tristesse. Je pleure en écrivant ces lignes.

J'ai écrit un texte qui sera lu demain à 9h30 lors de la cérémonie avant l'inhumation. Les mots ne seront jamais d'inutiles bouées. Ils relient les êtres qui s'aiment dans leurs pensées les plus intimes… Ils sont la cristallisation, l'ancrage, le pont entre les vivants mais aussi entre tous nos êtres chers qui ne sont plus de ce monde tangible… Ces flots d'étincelles nourrissent des éthers vaporeux, des flots de consciences… d'humanité non corporelle. Ma sœur n'a jamais pu avoir les enfants qu'elle espérait, mais elle avait de la lumière dans le regard.

Je ne suis pas de ceux dont l'oubli est ancré au corps comme une inutile griffe.

Est-ce pour cela que j'aime les reflets, que j'aime les troncs, les arbres immortels, les mots que l'on partage et les étincelles dans les yeux.