Photo d'Antoine

J’avais beau regarder la cime de ces arbres…
J’avais beau me sentir si petit.
J’avais beau écouter le vent dans les nuages
J’avais beau repousser mon envie…

L’envie de t’embrasser
Hors d’haleine.

J’ai parlé de toi à ma mère
Beaucoup.
Je lui ai que nous partirions demain
J’ai soufflé dans mes doigts gourds, raidis par la poussière
J’ai hurlé, j’ai pioché, j’ai sué sang et eau
J’ai assumé la fuite.

Ne plus se retourner.

Moi, pauvre péon de la Sangre Mayor
Pauvre bougre à la peau de dièses et de bémols
Aux yeux blancs comme la lune
Aux mains rudes et noueuses.

Toi, si belle, si douce…
Que la mer serait une insoumise.

Fuir vers le sud, de l'autre côté de la frontière
Passer le guet…

Sortir de la forêt.
Échapper aux fusils à lunettes.

Ne pas se retourner

Courir, toujours courir
Et regarder le ciel…

Le ciel qui sourit entre les cimes de ces arbres…
Si hauts…