Dimanche, quand nous sommes entrés dans la grande salle de convivialité, beaucoup étaient déjà en train de manger. Quand je dis cela, je veux dire qu'on les aidait à manger.

Je me suis approché d'elle. Son regard était sombre. Fixe. Elle ne bougeait pas. Jusqu'à il y a quelques mois, je l'aurais observé en autonomie par rapport au repas. Là ce n'était plus le cas.

J'ai vainement essayé de lui signifier ma présence. Rien.

Ma main qui allait et venait devant son regard ne l'intéressait pas. Elle ne la voyait pas.

Alors je lui ai parlé comme je le fais toujours, caressant ses cheveux avec délicatesse. Rien.

Alors, on lui a apporté un plat pour manger, on m'a installé un petit tabouret et j'ai donné à manger à ma mère comme à un enfant.

Alors parfois, je me suis aperçu que j'ouvrais moi aussi la bouche lorsque je lui présentais une cuillèrée, comme quand je nourrissais mes très jeunes enfants.

Une sorte de déjà vu à l'envers.

Impression que ma mère ne se rend plus compte de rien. Si c'est vraiment cela, d'une certaine façon, c'est une bonne chose pour elle.

Mais qui peut savoir ?