Je comprends ce que les gens disent. C’est pénible, je n’en ai pas l’habitude. Je déteste ça. Les gens parlent, j’entends sans avoir besoin d’écouter et je comprends. C’est infernal. J’ai l’impression de me mêler de ce qui ne me regarde pas. D’ailleurs ça ne m’intéresse pas, je ne veux pas savoir. J’en ai marre ! Je ne veux plus entendre. Marre !
Elle me regarde, me sourit et je sais qu’elle me déteste. Elle me trouve trop maigre, trop chauve, trop pénible. Elle emploie des mots durs. C’est affligeant car il faut que je lui souris. Elle me prend la main, m’embrasse et ses yeux marquent le dédain de l’intérieur.
L’autre là-bas, il fait comme s’il ne s’intéressait à rien, pourtant il pense à une fille qui s’appelle Olga, si loin, si seule. Il ne pense qu’à ça. Elle est physiquement charmante. Elle a dansé pour lui, hier… Dans une sorte de rituel d’amour… Je ferme les yeux. J’entends. Je parle pour compenser les voix. Bof. Rien n’y fait. Je sors du bar. Je la laisse plantée au coeur de Buenos Aires, la ville aux yeux masqués. Mince ! Il aurait du éteindre cette foutue radio !
L’air est frais. L’aube arrive. Quatre heures du matin, c’est l’instant le plus lourd…
J’ouvre la porte.
J’allume la télé et là… Ma tête se vide. Je vois des images… Des pubs, de l’info, des gens qui discutent et rien. Rien que le néant abyssal des électrons qui s’entrechoquent.