Parler de rencontres en Grèce reste un exercice difficile, non pas pour le souvenir qu'on en a mais pour le choix que l'on doit faire.

Ici je vais m'arrêter sur 2 belles âmes qui ont en commun la combativité, l'énergie et l'enthousiasme d'être grec.

Quand nous allons dans cette région de la Grèce, il nous arrive de nous rendre à Σουφλί qui est la ville de la soie par excellence. Et là nous sommes en admiration devant les étoles, les foulards, les plaids, les cravates de toutes sortes, les petits cocons montés en bijou. La ville est belle. Orientale.

Cela nous donne bien sûr l'occasion d'acheter quelques petits cadeaux pour nos enfants et pour nos amis. Pour nous aussi.

Cette année lorsque nous sommes passés à Σουφλί comme il était un peu tard nous n'avons pas pu apprécier tout cela. Nous avons quand même trouvé une petite taverne sympa et dégusté de la bière de Santorin, la Volkan, avec un ensemble de plats grecs dressés sur la table pour tout le monde. Une particularité grecque aussi. Ici personne ne s'offusque de servir 10 personnes sans que cela soit 10 fois un menu. C'est très chouette, ça minimise le prix et surtout ça apporte de la convivialité.

À Alexandroupoli, cette année nous avons retrouvé Δημήτριος et sa femme qui tiennent un magasin "Μυρσίνη" avec des produits de Thrace non loin d'une petite place proche du port. Le magasin est petit. Leur fille les aide un peu. C'est bien rangé. La bonne humeur est omniprésente, la gentillesse aussi. Nos yeux sont écarquillés.

L'accueil est chaleureux. Ma douce parle grec. Δημήτριος le sourire éclatant nous montre sa petite production en soie, les petits bijoux, les T-shirts brodés de motifs antiques. Généralement nous aimons revenir avec un T-shirt avec une inscription en langue locale. En Grèce comme aileurs la langue anglaise écrase de sa superbe tout régionalisme et l'on se retrouve avec des inscriptions en langue de Shakespeare du genre GREECE, Alexandroupoli par exemple. Triste.

Pourtant ici quelques motifs en langue grecque. Δημήτριος y tient. Alors nous parlons du pays. Comment vivent-ils cela ?

Mal bien sûr. Il nous raconte qu'il utilise d'anciennes bobines de fil de soie et d'or pour effectuer son travail. Il arrive à tenir grâce à ces stocks. Leur vie est humble mais ils ne lâcheront pas. Il s'adresse à son épouse par des αγάπη μου... Charmant !

Avec les chutes de fils et de tissus, ils créent des petits sacs pour que l'on puisse offrir… Autre chose qu'un sac en plastique, non ? C'est très raisonnable comme prix, ils ne doivent pas gagner grand chose sur leur vente mais ils résistent ainsi au prix d'un travail lourd et d'astuces de production sur des machines anciennes qu'ils retapent.

Une autre fois et alors que nous nous promenions dans la ville, nous arrivons sur cette place et les voyions attablés devant un café-frappé. Nous hésitons à les déranger. Mais pour eux, c'est ainsi que l'on fait, comme ils travaillent de 7h du matin à 21h, ils s'installent de temps à autres devant leur magasin et sirotent sans doute ce qui leur tient lieu de repas...

Alors on discute sur Massalia et ses origines grecques, sur Phocée, la Provence, l'avenir des enfants, le pays, l'incompréhension, l'humiliation.... Oui le pays est humilié ! Les jeunes s'en vont... Les plus âgés sont dans la misère, le système de santé est à l'agonie, des panneaux de vente de magasins ou d'appartements sont partout, les friches sont permanentes... Mais il y a de la vie et des jeunes qui regardent encore l'horizon devant eux.

Δημήτριος et son αγάπη μου survivent encore mais pour combien de temps ?

L'autre personne que je veux évoquer ici s'appelle aussi Δημήτριος et il est professeur de danses grecques (Thrace).

À l'occasion d'une fête organisée par nos amis sur le thème de la danse et de l'amitié franco-hellénique nous avons fait sa connaissance. Cet homme est l'enthousiasme personnifié. Il est d'un dynamisme communicatif… Il incarne le souffle de la Grécité. Il perpétue les traditions. C'est magique.

Petite anecdote bien triste que quelqu'un nous a racontée là-bas. Un touriste allemand est parti sans payer son repas dans une taverne en disant qu'il avait assez donné comme ça pour la Grèce. L'histoire ne dit pas comment s'est terminée cette scène. Sans généraliser bien sûr, parce qu'il y a des idiots partout, ça donne quand même une idée sur l'humiliation et l'arrogance de certains qui oublient un peu le passé.

(À SUIVRE)